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    Un viager pour la vie

Le viager et vous?

Aujourd'hui, 10% de la population a plus de 75 ans et à horizon 2050, la population des plus de 60 ans sera multipliée par deux et des plus de 85 ans sera multipliée par 4. Le viager est un investissement socialement responsable et intergénérationnel.

Le bon âge pour vendre en viager se situe entre 75 et 85 ans car après cet âge, le bouquet comme la rente viagère atteignent de tels montants que le risque n’est pas acceptable pour l’acquéreur, qui peut avoir à payer beaucoup plus que ce que l’espérance de vie laisser supposer.

Un viager pour la vie

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LA FRANCE et le vieillissement de la population


Dix ans de 
débats et autant de commissions, des linéaires de rapports et d’avis d’experts. Et au final une loi sur l’adaptation de la société au vieillissement, entrée en vigueur le 1er janvier, qui, faute de moyens, ne répond pas au défi du choc démographique.

La France compte déjà davantage de personnes de plus de 60 ans que de moins de 20 ans. Et cette tendance va s’ac­célérer du fait de l’augmentation de l’espérance de vie  : le nombre des plus de 85 ans (1,4 million actuellement) va quasiment ­quadrupler d’ici à 2050.

Heureusement, la grande majorité vieillit et vieillira dans de bonnes conditions. Mais ce n’est pas le cas de tous. Aujourd’hui, 1,2 million de personnes âgées souffrent de perte d’autonomie. Ce chiffre doit doubler d’ici à 2060. Pour elles, la loi ne va pas changer grand-chose, même si elle présente déjà le mérite d’exister.

 

« Ne minimisez pas les avancées de ce texte. L’allocation personnalisée d’autonomie à domicile progresse de 13  %, alors que jamais elle n’avait augmenté. Notre loi rend les aidants visibles, instaure un droit au répit, met l’accent sur la prévention et l’adaptation des logements… », défend Laurence Rossignol, la secrétaire d’Etat chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées, et de l’autonomie.

Soit, mais les 700 millions d’euros mobilisés paraissent bien maigres face aux besoins. « Les sommes mises sur la table sont nettement insuffisantes pour soulager les familles en les aidant à financer une place en éta­blissement ou à maintenir leur proche à domicile », regrette Joël Jaouen, président de France Alzheimer.

Le texte fait l’impasse, en effet, sur deux questions essentielles  : celle du financement de la perte d’autonomie et celle du coût des maisons de retraite. « Pour diminuer le reste à charge en établissement, il faut pouvoir ­mobiliser 1,5 milliard d’euros par an. Tant que l’Etat n’a pas retrouvé de marges de manœuvre budgétaires, cela ­semble difficile », justifie Mme Rossignol.

 

« La préoccupation grandit »

Ce constat ne devrait pas rassurer les Français  : 78,6  % considèrent que la perte d’autonomie des personnes âgées est un sujet important, et une écrasante majorité (84,2  %) plaide pour une réforme assurant un financement pérenne, selon le baromètre réalisé par l’Organisme commun des institutions de rente et de prévoyance (Ocirp­), France Info et ­Le Monde, publié à l’occasion du huitième débat sur la perte d’autonomie ­organisé à la Maison de la radio, à Paris, le 21 janvier.

« La préoccupation des Français sur cette question grandit, car les jeunes seniors sont aujourd’hui des aidants. La perte d’autonomie, ils la voient à l’œuvre, ils en mesurent les conséquences financières et psychologiques. Cela les inquiète aussi car ils se demandent comment leurs enfants, qui ont du mal à entrer sur le marché du travail et devront rester en activité plus longtemps, pourront à leur tour les prendre en charge », explique Sandra Hoibian, directrice du pôle évaluation et société au Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc).

« Il faut une régulation publique des tarifs des établissements, de leur gestion. La loi ne traite malheureusement pas ce sujet… »,Philippe Crevel, économiste

Difficile à vivre, la perte d’autonomie tourne rapidement au casse-tête financier. Une personne placée dans un établissement privé non lucratif devra débourser – après déduction des aides – 1 478 euros chaque mois, selon le cabinet d’audit KPMG, qui réalise tous les ans un observatoire des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Soit bien plus que les 1 306  euros de pension de retraite moyenne. Et encore, la facture est nettement plus salée dans des structures privées lucratives.

« Il faut une régulation publique des tarifs des établissements, de leur gestion. La loi ne traite malheureusement pas ce sujet. Ces structures doivent aussi améliorer leurs services, et donc leur image, en embauchant davantage de personnels, en mettant l’accent sur les soins alternatifs… », souligne l’économiste Philippe Crevel.

En attendant, il n’est pas étonnant que les familles tout comme les pouvoirs publics promeuvent le « bien vieillir à domicile ». Par choix, bien sûr (77  % des Français souhaitent passer leurs vieux jours chez eux plutôt que d’intégrer un établissement) et pour des raisons économiques, le reste à charge étant nettement moins élevé.

 

6 milliards d’euros d’aides informelles

Mais si cette solution est moins coûteuse, c’est grâce aux conjoints, aux enfants, qui s’éreintent en se transformant en auxiliaires de vie. Sans bruit, les aidants participent au financement de la dépendance. Sans eux, le système ne tient pas.

« Une étude a évalué à 6 milliards d’euros par an l’aide informelle des aidants. Cela nous donne une bonne idée, même si ce chiffre est à prendre avec précaution car dans les heures qu’ils déclarent ­dédier à leur proche, il y a des heures d’aide effective et d’autres durant lesquelles ils ne se consacrent pas exclusivement à leur proche », explique Marie-Eve Joël, professeur à l’université Paris-Dauphine.

Pourtant, la solidarité nationale joue déjà. Les dépenses publiques consacrées à la perte d’autonomie atteignent 21 milliards d’euros par an. Malgré cet effort de la collectivité, et sans compter le coût de l’aide informelle, les familles concernées en sont pour leur poche de plus de 7 milliards d’euros, car si les soins sont presque intégralement remboursés, ce n’est pas le cas des dépenses d’hébergement.

Or, cet effort va aller croissant. Non seulement les dépenses vont naturellement gonfler avec le vieillissement de la population – pour atteindre 51,6 milliards d’euros en 2060, soit 2,6  % du PIB – mais la part à la charge des ménages grimpera pour en représenter quasiment un tiers, soit… 16,5 milliards, selon les prévisions de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees).

Les sommes en jeu sont telles que « les besoins de financement du risque dépendance seront, selon toute vraisemblance, supérieurs à ceux de la retraite après 2050 », révélait une étude sur le marché de l’assurance dépendance publiée par l’Insee en février 2015.

D’où l’urgence de s’atteler à la tâche. « Après l’acte I, une loi en demi-teinte, il faut maintenant passer à l’acte II, en ouvrant, enfin, le chantier du financement de la perte d’autonomie, plaide Jean-Manuel Kupiec, le directeur général adjoint de l’Ocirp. Nos dirigeants ne partent pas de zéro, ils ont à leur disposition pléthore de rapports sur le sujet. »

Les exemples étrangers ont été auscultés sous toutes les coutures  : l’Allemagne a depuis longtemps ajouté un étage à son assurance-maladie, salariés et retraités payant des cotisations dont les recettes sont fléchées sur les dépenses de dépendance. Les pays nordiques financent une couverture particulièrement complète via l’impôt, et le Japon a mis en place un système mixte alimenté par l’impôt et la souscription d’une assurance obligatoire à partir de 40 ans.

 

En France, toutes les options imaginables ont été analysées au fil des ans  : mise en place d’un cinquième risque de sécurité sociale – promesse abandonnée de Nicolas Sarkozy, en février 2012 –, taxe sur les successions ou les donations, hausse de la CSG ou des cotisations sociales, nouvelle Journée de solidarité, mobilisation du patrimoine des particuliers, notamment immobiler en développant le viager… Bref, la palette est large, mais rien n’a jamais été tranché.

Il faut dire qu’après l’alourdissement de la fiscalité au début du quinquennat de François Hollande et le « ras-le-bol fiscal » qui s’est ensuivi, prononcer le mot impôt donne de l’urticaire aux Français. « Quant à augmenter les cotisations des actifs, cela provoquerait inévitablement une levée de boucliers des entreprises qui se plaignent à longueur de journée du coût trop élevé du travail en France », prévient Philippe Crevel.

« L’élection présidentielle de 2017 doit  de porter un grand débat sur l’autonomie, une sorte de conférence de consensus intégrant les citoyens, pour trancher cette question du financement »,Laurence Rossignol

Pourtant, il n’y a pas trente-six solutions. « Pour diminuer le coût supporté par les ménages, il faut mutualiser cette charge financière au niveau de l’ensemble des Français et non sur les seuls souffrant de perte d’autonomie. Cela passe soit par une hausse des prélèvements obligatoires, soit en rendant l’assurance dépendance… obligatoire. Il faudrait dans ce cas que la puissance publique régule le marché et décrive un contrat type. Mais si rien n’est fait, c’est le patrimoine des personnes dépendantes et de leur famille qui sera davantage utilisé à l’avenir », explique Roméo Fontaine, maître de conférences à l’université de Bourgogne et chercheur associé à la Fondation Médéric Alzheimer.

C’est cet arbitrage éminemment politique entre une logique de financement public et une logique assurantielle qui devra être rendu. Quand ? Laurence Rossignol repousse la question aux prochaines échéances électorales  : « L’élection présidentielle de 2017 doit être l’occasion de porter un grand débat sur l’autonomie, une sorte de conférence de consensus intégrant les citoyens, pour trancher cette question du financement. A mon sens, il vaut mieux faire davantage appel à la solidarité nationale, donc à l’impôt, pour renforcer l’APA [allocation personnalisée d’autonomie], sinon c’est l’assurance individuelle qui prendra du poids. Or un ­système assurantiel est source d’inégalités. »

Des assurances dépendance coûteuses

Les Français semblent moins catégoriques. D’après le baromètre Ocirp-France Info-Le Monde, 60,3  % d’entre eux estiment qu’il faut combiner solidarité nationale et assurance complémentaire. Trois quarts des sondés estiment aussi que placer 1 euro chaque jour à partir de 40 ans dans un contrat d’assurance dépendance serait une bonne idée.

Un résultat paradoxal, puisque les particuliers sont très peu couverts à titre individuel contre ce risque. Fin 2014, seuls 1,6 million de Français ont souscrit un contrat dépendance, selon la Fédération française des sociétés d’assurances. Nous ne jetterons pas la pierre aux autres, tant ces assurances sont com­plexes, contraignantes et peu protectrices.

« Ces produits sont coûteux, peu lisibles. La couverture et les modalités pour percevoir l’indemnité varient du tout au tout selon les compagnies. Une personne peut très bien percevoir l’APA sans être dépendante aux yeux de son assureur », déplore Roméo Fontaine, tout en notant que beaucoup de particuliers pensent être couverts par leur mutuelle. Le gouvernement est d’ailleurs censé se pencher sur la question, la loi prévoyant une concertation avec le secteur de l’assurance pour bâtir des « contrats plus protecteurs qui devront respecter un cahier des charges ».

« Le vieillissement, la perte d’autonomie, la mort restent mal acceptées dans nos sociétés occidentales. (…)Les politiques font donc carrière sur les jeunes, c’est beaucoup plus vendeur », Serge Guérin, sociologue

Débat sur le financement reporté en 2017, nouvelle concertation… Si les contraintes financières d’un Etat endetté rendent ­évidemment toute réforme compliquée, d’autres raisons peuvent expliquercette difficulté à faire bouger les lignes.

« Le vieillissement, la perte d’autonomie, la mort restent mal acceptées dans nos sociétés occidentales. Cela va à l’encontre de notre quête sans fin pour la technologie, les progrès de la médecine,explique le sociologue Serge Guérin. Les politiques font donc carrière sur les jeunes, c’est beaucoup plus vendeur  : on investit pour la jeunesse, alors que les sommes consacrées à la vieillesse sont considérées comme des dépenses en pure perte. Et pourtant, ne pas traiter ce sujet est particulièrement angoissant dans une société qui, justement, vieillit. »

Faudrait-il alors transformer ce qui est perçu comme un fardeau en une opportunité ? Michèle Delaunay, la prédécesseure de Mme Rossignol, a tenté de le faire en s’improvisant VRP de la « silver économie ». Objectif  : mettre l’accent sur le potentiel économique du vieillissement, source de croissance et de créations d’emplois, ce qui n’est pas du luxe par les temps qui courent.

Autre point positif de ce défi démographique, il doit être l’occasion de repenser l’urbanisme, les logements, les transports pour les rendre accessibles. Le chantier est colossal  : l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) estime à 2 millions le nombre de logements occupés par des ménages de plus de 60 ans devant être adaptés pour faire face au handicap.

 

Sans les aidants, pas de maintien à domicile

En fait, la question du vieillissement doit interroger l’ensemble de la société. L’importance du rôle joué par les aidants, par exemple, mérite mieux que la simple reconnaissance prévue dans la loi. De nombreux pays européens investissent sur cette solidarité familiale en adoptant des politiques particulièrement généreuses à leur égard.

En France, on en est loin, ce qui peut paraître contradictoire, puisque sans eux le maintien à domicile des personnes en perte d’autonomie ­devient impossible. A ce titre, les entreprises doivent elles aussi s’impliquer, au vu du nombre croissant de salariés accompagnant un proche dépendant. « La moitié des aidants étant en activité, les entreprises, les partenaires sociaux doivent s’emparer de cette question. Ce sujet doit être davantage porté par les syndicats », souligne Laurence Rossignol.

Accepter cette transition démographique devrait enfin être de nature à renforcer le lien entre les générations, à l’image du développement de ces résidences où vivent, ensemble, anciens et plus jeunes. « Cette solidarité intergénérationnelle est le ciment de notre société. Il faut sortir du jeunisme ambiant et s’organiser pour que chacun, jeune et moins jeune, trouve sa place, souligne Jean-Manuel Kupiec. En creux, c’est ce lien que cherche à préserver la loi sur l’adaptation de la société au vieillissement, même si, derrière ces bonnes intentions, les moyens ne suivent pas. »

 

Les principales mesures de la loi

Entrée en vigueur le 1er janvier, la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement prévoit de mobiliser près de 700 millions d’euros par an. Le financement sera assuré par la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (Casa), cette taxe de 0,3 % prélevée sur les pensions de retraite, préretraites et pensions d’invalidité.

  • Allocation personnalisée d’autonomie. L’APA à domicile est revalorisée, les plafonds des plans d’aide étant augmentés et le reste à charge réduit (350 millions d’euros).

  • Aidants. Reconnaissance du statut de « proche aidant » et création d’un « droit au répit » pour financer l’accueil temporaire de la personne en perte d’autonomie (78 millions d’euros).

  • Prévention. Les personnes âgées aux revenus modestes seront aidées financièrement pour s’équiper en matériel technique (domotique, télésurveillance…). Le texte prévoit le développement d’actions de prévention (140 millions d’euros).

  • Résidence autonomie. 175 foyers logements, compromis entre le domicile et la maison de retraite, seront rénovés et modernisés, soit 8 000 logements (40 millions d’euros). Il est aussi prévu une enveloppe de 40 millions d’euros pour assurer des actions de prévention dans ces résidences.

  • Logement. D’ici à 2017, 80 000 logements privés seront rénovés pour les adapter à la perte d’autonomie (40 millions d’euros).