Le droit viager au logement du conjoint survivant peut s’exercer de manière tacite
Un an pour manifester sa volonté de bénéficier du droit viager au logement
Le conjoint survivant dispose d’un délai d’un an à compter du décès de son époux pour manifester sa volonté de bénéficier de son droit viager au logement, conformément aux articles 764 et 765-1 du Code civil. Ce droit lui permet de conserver l’usage du logement familial et de ses meubles, à titre viager.
Contrairement à une idée reçue, cette manifestation de volonté n’a pas à être nécessairement expresse : elle peut être tacite, comme le rappelle la Cour de cassation dans un arrêt du 13 février 2019 (n°18-10171).
L’affaire : un conflit successoral autour du droit au logement
Dans cette affaire, un homme décède en laissant pour héritiers son fils, issu d’une première union, et sa conjointe mariée sous le régime de la séparation de biens. Le logement familial, acquis en indivision par les époux, est occupé par la conjointe au moment du décès.
Des tensions apparaissent lors du règlement de la succession. La veuve souhaite faire valoir son droit d’usage et d’habitation viager, tandis que le fils considère qu’elle est occupante sans droit ni titre et lui réclame une indemnité d’occupation à compter du 25 juillet 2008.
La Cour d’appel rejette la demande de l’épouse
La Cour d’appel de Versailles estime que l’épouse n’a pas exprimé sa volonté dans le délai légal d’un an. Elle juge que les termes employés dans une assignation délivrée au fils le 19 octobre 2007, où elle indiquait vouloir conserver l’appartement “conformément à la loi”, sont trop vagues. Selon la Cour, cette expression n’implique pas nécessairement la volonté d’exercer un droit viager au logement, car d’autres mécanismes comme l’attribution préférentielle sont également possibles.
La Cour de cassation reconnaît une manifestation tacite du droit viager
La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel. Elle rappelle que la volonté du conjoint survivant de bénéficier de son droit viager au logement peut être tacite. En l’espèce, l’épouse s’était maintenue dans les lieux et avait mentionné sa volonté de conserver le logement dans une assignation.
De plus, elle avait confirmé cette volonté dans un projet d’acte de notoriété établi avant toute opposition du cohéritier. Ces éléments permettent de considérer que la condition de manifestation dans le délai d’un an est remplie, même en l’absence d’acte formel explicite.
Droit viager au logement : une protection essentielle pour le conjoint survivant
Cet arrêt de la Cour de cassation est un rappel fondamental : le droit viager au logement du conjoint survivant est un droit protecteur, et la volonté d’en bénéficier peut résulter de faits concrets, comme le maintien dans le logement ou des déclarations non équivoques, même sans acte écrit formel.
Pour conclure
Le conjoint survivant peut donc manifester tacitement sa volonté de bénéficier de son droit viager au logement, notamment par le maintien dans les lieux ou par des déclarations non équivoques. Il est essentiel de connaître ces règles pour sécuriser ses droits successoraux, éviter les litiges, et garantir la protection du logement familial après le décès du conjoint.