Vente en viager requalifiée en donation déguisée : attention à l’abus de droit fiscal !
⚖️ Un arrêt de la Cour d'appel de Paris à retenir
La Cour d’Appel de Paris a récemment rendu un arrêt éclairant sur les risques de requalification d’une vente en viager en donation déguisée, faute de paiement du prix convenu. Une décision qui rappelle l’importance du respect des conditions propres au viager pour éviter toute requalification fiscale et les lourdes sanctions qui en découlent.
🏠 Les faits : une vente en viager sur fond d’amitié et de soupçons fiscaux
Dans cette affaire, un bien immobilier estimé à 200 000 € est vendu en viager par une dame âgée de 96 ans. Le contrat prévoit :
- Un bouquet de 50 000 € à verser comptant,
- Une rente viagère annuelle de 36 000 €, payable mensuellement (soit 3 000 €/mois).
Mais moins d’un an plus tard, la venderesse décède, sans avoir perçu ni le bouquet, ni la moindre rente. De quoi éveiller les soupçons de l’administration fiscale, qui y voit une donation déguisée dissimulée sous une fausse vente en viager.
🚨 Requalification fiscale : les indices retenus par les juges
Le fisc et les juges du fond ont identifié plusieurs indices révélateurs d’un abus de droit :
- L’âge avancé de la venderesse (96 ans) et le décès rapide après la signature (10 mois), rendant la vente non aléatoire, condition pourtant essentielle du viager.
- La situation financière précaire des acquéreurs, déjà visés par un redressement fiscal peu de temps avant la vente.
- L’absence totale de paiement du bouquet et des rentes prévues au contrat.
- L’existence de liens personnels étroits entre les parties (amitié), et plusieurs chèques émis auparavant par la venderesse à leur profit.
Ces éléments traduisent, selon la juridiction, une intention libérale, incompatible avec une véritable vente.
💸 Sanctions : lourde addition pour les acquéreurs
La vente ayant été requalifiée en donation, les acquéreurs ont été :
- Condamnés au paiement des droits de donation,
- Frappés d’une majoration de 80 % pour abus de droit fiscal (article L64 du LPF).
La Cour d'appel de Paris a confirmé cette décision, sanctionnant un montage juridique fictif au détriment de l’administration.
📌 Leçon à retenir : prudence dans la structuration d’une vente en viager
Cet arrêt rappelle que la vente en viager ne doit pas être utilisée comme un détournement fiscal déguisé. Pour être valide, le contrat doit :
- Présenter un aléa réel et sérieux,
- S’appuyer sur une capacité financière avérée des acquéreurs,
- Être exécuté conformément aux engagements pris (paiement du bouquet et des rentes).